Déclaration du président C.T. (Manny) Jules
concernant la redevance sur les ressources des Premières Nations (RRPN)
Le 30 janvier 2023
Depuis 2012, la Commission de la fiscalité des premières nations et les Premières Nations intéressées collaborent sur l’élaboration d’une proposition appelée la redevance sur les ressources des Premières Nations (RRPN). Cette proposition favorisera l’exercice de leur compétence fiscale sur les projets d’exploitation des ressources qui se déroulent sur leurs terres.
Recevoir une part des avantages fiscaux tirés de l’utilisation des terres ancestrales et des ressources qui s’y trouvent est une priorité pour les Premières Nations depuis la Confédération. Entre 1867 et 1930, les Premières Nations ont été systématiquement soustraites, par voie législative, de la fédération et de l’économie canadiennes. Tous les pouvoirs et les ressources des gouvernements des Premières Nations leur ont été enlevés et ont été répartis entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Cela a entraîné une dépendance, une pauvreté et une disparité de la qualité des services permanentes.
Depuis les années 1970, plusieurs décisions des tribunaux ont confirmé que les Premières Nations avaient un droit inhérent aux avantages fiscaux que procurent les projets d’exploitation des ressources sur leurs terres. Toutefois, il n’y a aucun mécanisme en place et les gouvernements résistent à ces décisions. Par conséquent, chaque projet d’exploitation des ressources nécessite des dispositions uniques qui ont des répercussions importantes sur les investissements et qui entraînent des fardeaux inutiles sur les Premières Nations. La proposition de la RRPN constitue un pas important vers une résolution à ce problème.
Cette initiative dirigée par les Premières Nations favoriserait l’obtention, par leurs gouvernements, de recettes fiscales directes, garanties et stables provenant des projets d’exploitation des ressources sur leurs terres, à l’instar des autres gouvernements.
Nous continuons de collaborer avec les Premières Nations intéressées sur la conception et l’élaboration de cette proposition. Au cours des prochains mois, nous organiserons une réunion avec les Premières Nations intéressées afin de leur présenter un aperçu de la proposition, de cerner les exigences législatives concernant sa mise en œuvre, d’élaborer les prochaines étapes et de demander leur contribution et leur appui.
En quoi consiste
la RRPN ?
Il s’agit d’une proposition des Premières Nations qui leur donnerait la possibilité de mettre en œuvre un régime de redevances préétablies fondées sur l’utilisation des terres et les ressources sur leur territoire ou leurs terres ancestrales. Le régime de redevances serait établi dans le droit des Premières Nations. Il y aura des redevances distinctes pour chaque type de projet d’exploitation des ressources, qui seraient normalisées dans l’ensemble d’une province ou possiblement dans l’ensemble du pays. Par exemple, il y aurait des assiettes et des taux de redevance distincts pour les projets d’exploitation minière, forestière, de pipeline ou autres projets admissibles.
POURQUOI UNE REDEVANCE SUR LES RESSOURCES DES PREMIÈRES NATIONS ?
LES PREMIÈRES NATIONS EXCLUES DE L’ÉCONOMIE PAR VOIE LÉGISLATIVE
Entre 1867 et 1930, les Premières Nations ont été systématiquement soustraites, par voie législative, de la fédération et de l’économie canadiennes. Tous les pouvoirs des gouvernements des Premières Nations leur ont été enlevés et l’extraction des ressources a été effectuée en grande partie sans consultation ni indemnisation. Les pouvoirs de perception d’impôts des Premières Nations leur ont été enlevés, entraînant ainsi un manque de moyens pour revendiquer leurs titres, améliorer l’infrastructure communautaire et prendre soin de leurs membres et mettre leurs compétences en œuvre. Cela s’est traduit par la dépendance et la pauvreté des Premières Nations et par une différence importante dans la qualité des services obtenus par rapport au reste de la population canadienne.
LES DROITS DES PREMIÈRES NATIONS RECONNUS
Presque un siècle plus tard, vers la fin des années 1970, des décisions de la Cour suprême, comme celles dans l’affaire Calder, l’affaire Delgamuukw, l’affaire Haisla, l’affaire Tsilhqot’in et l’affaire Robinson-Huron, ont reconnu les droits des Premières Nations et leur titre sur les terres ancestrales et l’obligation des autres gouvernements de prendre des mesures d’adaptation à cet égard. Cette reconnaissance a conduit à la pratique récente consistant à demander le consentement des Premières Nations aux projets de développement par le biais d’ententes négociées. Ces ententes étaient parfois conclues avec les entreprises d’exploitation des ressources et parfois avec les provinces et territoires. Elles comprenaient souvent diverses formes de compensation financière dans les accords de partage des avantages et des recettes issues des ressources. Cela a créé des avantages fiscaux pour les Premières Nations, mais ce n’était pas un processus efficace pour les mettre en œuvre.
LE CHEMIN VERS LA RÉCONCILIATION ÉCONOMIQUE
La RRPN constitue un pas important vers la réconciliation économique. Elle rétablit le droit des Premières Nations ignoré depuis longtemps de partager les recettes issues de l’exploitation des ressources. Elle génère des recettes qui peuvent être utilisées pour aider les Premières Nations à mieux tirer profit des possibilités d’emploi et d’affaires qui en découlent. Elle procurera ces recettes dans des conditions qui libéreront les Premières Nations des conditions de financement, conformément au droit à l’autodétermination demandé par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA).
QUI PROFITE DE LA RRPN ?
PREMIÈRES NATIONS
La RRPN mettra pratiquement en œuvre la compétence fiscale des Premières Nations sur les terres ancestrales. Elle générera par conséquent des recettes importantes et stables pour les gouvernements des Premières Nations. Elle fournira des recettes qui permettront de mieux soutenir l’autodétermination et la mise en œuvre d’autres compétences. Elle réduira les exigences importantes que les propositions de projets imposent aux administrations des Premières Nations. Elle aidera à augmenter la qualité de l’infrastructure et des services publics des Premières Nations de façon à ce qu’elle corresponde aux normes nationales.
CLIMAT D’INVESTISSEMENT DANS LES RESSOURCES
La proposition de RRPN améliorerait le climat d’investissement dans les ressources du Canada et favoriserait la réconciliation économique. La RRPN remplacerait les différents processus de négociation concernant les éléments financiers des accords de consentement entre les Premières Nations, les entreprises d’exploitation des ressources (les promoteurs) et les gouvernements provinciaux par le biais d’un système normalisé de redevances.
SECTEUR DES RESSOURCES (INDUSTRIE)
Il est proposé que si une entreprise paie une RRPN, elle se verra accorder un allégement fiscal fédéral à peu près équivalent en termes de valeur, que ce soit par le biais d’un crédit d’impôt ou d’un autre mécanisme. De cette façon, le gouvernement fédéral cédera une marge fiscale aux Premières Nations.
La coordination fiscale aura l’effet net suivant :
- Aucune Première Nation ne sera désavantagée en ayant un taux effectif d’imposition plus élevé sur ses terres.
- Aucune entreprise ne sera confrontée à un taux effectif d’imposition plus élevé en raison de la RRPN.
La coordination fiscale permet de s’assurer que la RRPN sera une entente intergouvernementale de mise en œuvre des droits et titres. Cela n’impose pas cette obligation uniquement aux Premières Nations et aux entreprises d’exploitation des ressources.
L’élaboration de RRPN assurera également :
- La simplification des négociations de consentements;
- Une plus grande transparence pour les intervenants et le public;
- La fourniture d’une plateforme permettant d’améliorer les éléments économiques et environnementaux des accords;
- La réduction des exigences relatives à la gestion continue des contrats par les entreprises.
AVANTAGES POUR LES GOUVERNEMENTS
La négociation d’accords fiscaux individuels pour chaque Première Nation concernant chaque projet est trop incertaine, prend trop de temps, coûte trop cher et donne lieu à une série d’accords ponctuels qui compromettent l’intégrité du régime fiscal. Par conséquent, cela coûte à l’économie canadienne des milliards de dollars en investissements perdus et des milliards aux gouvernements canadiens en recettes fiscales perdues.
La RRPN proposée simplifiera et normalisera le processus d’investissement dans les projets d’exploitation des ressources afin de favoriser un investissement plus fructueux et d’assurer une plus grande intégrité des régimes fiscaux. Cela réglerait les préoccupations liées au chevauchement des revendications territoriales, tout en favorisant la réconciliation économique. De meilleures économies des Premières Nations appuient l’autodétermination.
Ces projets de principes ont pour but de faciliter la discussion visant à éclairer l’élaboration d’un cadre stratégique pour la redevance sur les ressources des Premières Nations.
- La RRPN sera toujours facultative pour les Premières Nations;
- Les Premières Nations ont un droit inhérent aux avantages fiscaux générés par l’utilisation de leurs terres et de leurs ressources reconnu par divers tribunaux;
- La RRPN fait partie d’une nouvelle relation financière qui appuie la mise en œuvre des compétences des Premières Nations;
- La RRPN serait établie dans le droit des Premières Nations;
- La conception et la mise en œuvre de la RRPN continueront d’être dirigées par les Premières Nations intéressées et appuyées par la Loi sur la gestion financière des premières nations (LGF); Les institutions appuieraient la mise en œuvre de la RRPN de la même façon qu’elles appuient les autres pouvoirs fiscaux conférés en vertu de la LGF.
ÉLÉMENTS CLÉS
- La RRPN doit être appuyée par de la coordination fiscale avec les autres gouvernements de façon à ce qu’elle partage la marge fiscale entre les gouvernements et à ce qu’elle n’impose aucun coût supplémentaire;
- La RRPN pourrait remplacer d’autres mécanismes d’établissement des prix liés à la tarification de l’utilisation des terres et des ressources des Premières Nations;
- Les Premières Nations participantes appliqueraient des taux normalisés à une assiette normalisée pour tous les types de projets d’exploitation des ressources du même genre. Cette uniformité pourrait être pour l’ensemble d’une province ou possiblement l’ensemble du pays;
- La RRPN ne signifierait pas le consentement implicite de la Première Nation au projet. Les Premières Nations participantes auraient toujours à évaluer les avantages économiques proposés et les impacts sur l’environnement;
- Selon le type de projet, la RRPN pourrait commencer au stade de l’exploration et se poursuivre jusqu’au stade du déclassement.
FAQ